29.11.2017
Il y a cinquante ans jour pour jour, le 29 novembre 1967, le mémorial dédié aux victimes du génocide des Arméniens était officiellement inauguré sur la colline de Tsitsernakaberd. Le Mémorial du génocide des Arméniens est légitimement considéré comme le plus important et le plus impressionnant monument de son genre. C’est un monument unique qui unit la nation arménienne.
En 1965, lors du cinquantième anniversaire du génocide des Arméniens, les victimes du génocide étaient commémorées pour la première fois dans l’Arménie soviétique au niveau de l’état, après un long silence imposé. Un des principaux promoteurs de ces événements commémoratifs, ainsi que de la construction du Complexe commémoratif, était le premier secrétaire du Comité central du Parti communiste d’Arménie, Yakov Zarobyan (1908 - 1980). En 1960, il devint le premier secrétaire du Comité central du Parti communiste d’Arménie et, en tant que figure patriotique, il apporta non seulement une croissance économique élevée et le développement mais, rompant également avec la chaîne idéologique du Parti communiste, il développa des programmes à échelle nationale, jugés pourtant impossibles à cette époque, tels que l’affermissement des liens avec la diaspora, l’organisation d'événements pour le cinquantième anniversaire du génocide des Arméniens, la construction du Mémorial du génocide, etc.
En 1964, il prenait toujours part à des rencontres et à des discussions avec de hauts responsables de l’URSS, tels que M. Suslov, A. Gromikoy, N. Podgorna, et également N. Khrushyov et L. Brejnev, essayant d’obtenir la permission nécessaire à la mise en œuvre de ses projets.
Le 13 décembre 1964, Yakov Zarobyan envoya une lettre intitulée « Concernant les événements dédiés au cinquantième anniversaire de l’extermination de masse des Arméniens de 1915 » au Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique, soulignant que l’extermination de masse et la déportation des Arméniens « étaient l’exécution à grande échelle de la politique génocidaire menée par la clique turque criminelle gouvernant à cette époque. »
Comprenant parfaitement les relations amicales qu’entretenait l’URSS avec la Turquie, Zarobyan modifia le nom du mémorial, le présentant comme un « monument dédié à toutes les victimes arméniennes sacrifiées lors de la Première Guerre mondiale » (par ce biais, il facilita le processus d’obtention de la permission émanant de Moscou de bâtir le Complexe commémoratif). Durant cette même période, le 16 mars 1965, le Conseil des ministres de l’Arménie soviétique adopta une résolution sur la « construction d’un monument destiné à perpétuer la mémoire des victimes du
Yeghern (désastre) de 1915. »
Le 5 février 1966, Zarobyan était relevé de ses fonctions de premier secrétaire du Comité central du Parti communiste d’Arménie et était assigné à de nouvelles fonctions.
Les événements pan-arméniens initiés et mis en œuvre par Zarobyan ont grandement contribué à la reconnaissance internationale et à la condamnation du génocide des Arméniens.
Un monument dédié à la mémoire des victimes du génocide des Arméniens de 1915
Le 16 mars 1965, sur décision du Conseil des ministres de l’Arménie soviétique, étaient publiés dans les journaux le programme et les conditions de la compétition républicaine relative à la construction d’un monument commémorant les victimes du génocide arménien. Le monument avait pour but de commémorer les victimes du génocide arménien et, dans le même temps, de symboliser la renaissance du peuple arménien, ainsi que son présent et son futur radieux : c’était là la principale exigence de la compétition.
Plus de 78 projets entrèrent en compétition. Une commission composée de douze membres réputés (présidée par le spécialiste Aghababyan) choisit le projet « Drapeau de la République socialiste et soviétique arménienne » (architectes : A Tarkhanyan, S Qalashyan). 776 800 roubles furent alloués pour la construction du monument et la société Ergimshin fut sélectionnée pour la maîtrise d’œuvre (directeur général : Petros Tumanyan, directeur du département de construction : Arshavir Minasyan, chef de section : Artyusha Ordukhanyan).
Les architectes choisirent pour monument une structure en trois dimensions. Suivant les plans, 12 piliers de basalte se courbent vers la flamme éternelle, formant ainsi une structure conique ouverte, qui symbolise la tombe des victimes du génocide des Arméniens. Le mémorial s'élançant dans le ciel est le symbole de la renaissance du peuple arménien. Le mur commémoratif unifie la structure et, sur le côté opposé à celui-ci, se trouvent depuis 1996 des arbres plantés par des personnalités publiques et politiques, ainsi que des intellectuels ayant élevé leurs voix contre le génocide des Arméniens. En 2002, les noms des villes arméniennes les plus peuplées de l’Empire ottoman furent gravés sur le mur commémoratif.
La construction de ce monument fut réellement un événement d’importance nationale. De nombreux arméniens de différents villages et villes de la République vinrent offrir leur assistance aux ouvriers.
La cérémonie d’ouverture officielle était initialement prévue le 24 avril 1967, mais fut déplacée au 29 novembre, jour de l’établissement du régime soviétique en Arménie. Des dignitaires de haut rang et des intellectuels de la République assistèrent à la cérémonie d’ouverture, qui fut diffusée sur la radio républicaine et à la télévision.
En 1968, le monument fut présenté à l’Union annuelle des jeunes architectes et fut récompensé d’un prix de première catégorie.
ARCHITECTES :
Arthur Tarkhanyan (1932-2006)- Architecte d’honneur de la République socialiste et soviétique d’Arménie (1972) Architecte du peuple de la République socialiste et soviétique d’Arménie (1987). Il fut récompensé par la médaille Anania Shirakatsi (1998). Il fut membre du Conseil suprême de la République socialiste et soviétique d’Arménie (1980-1989). Il est diplômé de l’Université nationale d'architecture et de construction de l'Arménie (professeur depuis 1993). Il a été sélectionné pour plus de vingt monuments, incluant :
Le Mémorial dédié aux victimes du génocide des Arméniens (Erevan, 1967)
Le monument Martiros Saryan (Erevan, 1986)
Le monument pour le cinquantième anniversaire de l’Arménie soviétique (Dilijan, 1970)
La statue de Charles Aznavour (Gyumri, 2001)
Son travail en compagnie de co-auteurs :
Les bâtiments composant l’Institut des sciences sociales de l’Académie nationales des sciences d’Arménie (1955-1972)
Le cinéma Rossia (1970-1974, récompensé par le Conseil des ministres de l’URSS, 1979)
Youth Palace (1970-1985, récompensé en 1981)
L’aéroport international de Zvartnots (1981, Prix d’état de l’URSS en 1985)
Le Sport et Concert Complex (1984, Prix d’état de l’URSS en 1987)
Sashur Qalashyan (1936)- Architecte d’honneur de la République socialiste et soviétique d’Arménie (1987). De 1976 à 1994, il occupa la fonction d’architecte en chef de Gyumri. De 1995 à 2000, il fut l’architecte en chef de l’institut Armproject et, depuis 2000, il assure les fonctions de directeur-adjoint de l’institut.
Avec la copaternité de Kalashian, les mémorials et bâtiments suivants ont été construits :
Mémorial pour les victimes du génocide des Arméniens (Erevan, 1967)
Le Musée-Institut du Génocide des Arméniens (Erevan, 1995)
Kumayri, le musée-conservatoire national historico-architectural (Leninakan, maintenant Gyumri, 1980, Prix d’état de l’URSS, 1985).
La rénovation du Mémorial dédié aux victimes du génocide des Arméniens, de 2011 à 2015, l’allée du Tsitsernakaberd et les aires environnantes ont également été rénovées.
Après la déclaration officielle d’indépendance en 1991, les visites de délégations officielles de différents pays au Mémorial du génocide des Arméniens sont devenues une tradition et, depuis la loi du 16 mars 2002 relative au modèle protocolaire étatique de la République d’Arménie, l’agence du Protocole d’état assure l’organisation des visites. Sur un accord mutuel des parties, la visite du Mémorial du génocide des Arméniens devint une part intégrante du protocole d’état.
Le protocole d’état suppose que les délégations se rendant à Erevan pour une visite officielle rendent hommage aux victimes du génocide des Arméniens, déposent des fleurs ou une gerbe au niveau du mémorial, visitent le musée puis plantent des arbres.
Des milliers de délégations officielles ont visité la République d’Arménie, présidents de différents pays, chefs religieux, présidents de parlements, parlementaires, membres du gouvernement, membres d’organisation internationales, scientifiques, personnalités internationalement reconnues du monde de la culture, et se sont également rendues au Mémorial du génocide des Arméniens.
Par Gohar Khanumyan et Arevik Avetisyan
Manifestations du 24 avril sur la place Lénine, Erevan, 1965, collections du MIGA
Manifestations du 24 avril sur la place Lénine, Erevan, 1965, collections du MIGA
Les manifestants du 24 avril en plein discours, Erevan, 1965, collections du MIGA
Etudes préliminaires (architectes : A. Tarkhanyan, S. Kalashyan, H. Poghosyan), Erevan, 1965
Modèle de la version originale élaborée lors de la première phase de la compétition (architectes : A. Tarkhanyan, S. Kalashyan, H. Poghosyan, Sculptor, V. Khachatryan), Erevan, 1965
Version en compétition du modèle (architectes : A. Tarkhanyan, S. Kalashyan, H. Poghosyan), Erevan, 1965, collections du MIGA
Modèle modifié après compétition (architectes : A. Tarkhanyan, S. Kalashyan, H. Poghosyan), Erevan, 1965, collections du MIGA
Structure du monument, échelle proportionnelle
Structure du monument, échelle proportionnelle
Ouvriers ayant travaillé sur le monument, Erevan, 1965/1966, collections du MIGA
Ouvriers ayant travaillé sur le monument, Erevan, 1965/1966, collections du MIGA
Ouvriers ayant travaillé sur le monument, Erevan, 1965/1966, collections du MIGA
Ouvriers ayant travaillé sur le monument, Erevan, 1965/1966, collections du MIGA
Ouvriers ayant travaillé sur le monument, Erevan, 1965/1966, collections du MIGA
Ouvriers ayant travaillé sur le monument, Erevan, 1965/1966, collections du MIGA
Processus de construction du monument, Erevan 1965/1966, collections du MIGA
Représentants officiels inaugurant le Complexe commémoratif du génocide des Arméniens, le 29 novembre 1967 : le premier secrétaire du Comité central du Parti communiste, Anton Qochinyan, allume la flamme éternelle avec la torche élaborée dans les fours de l’usine chimique Yerevan Kirov Chemical Plant Furnace. Derrière lui (de gauche à droite), se tiennent le premier vice-président du Conseil des ministres de l’URSS Suren Movsesyan, le premier secrétaire du Comité du Parti communiste d’Erevan Karen Demirchyan, le président du Praesidium du Soviet suprême de l’USSR Nagush Harutyunyan, les célèbres poètes Paruyr Sevak et Silva Kapoutikyan, ainsi que d’autres dignitaires.
Collections du MIGA.
ՀԽՍՀ Կոմկուսի կենտկոմի առաջին քարտուղար Յա. Զարոբյանը իր աշխատասենյակում, Երևան, 1965 թ.
(Заробян Н. Я. Яков Заробян и его эпоха / Н. Я. Заробян, Ереван, 2008)
Arthur Tarkhanyan
Sashur Qalashyan
Arthur Tarkhanyan et Sashur Qalashyan en compagnie d’un Arménien issu de la diaspora, Erevan, 1968
Journée commémorative, 24 avril
Journée commémorative, 24 avril
Journée commémorative, 24 avril
Journée commémorative, 24 avril