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Aujourd’hui c’est le 160ième anniversaire de l’amiral français et grand humaniste, Louis Dartige du Fournet
Louis Dartige du Fournet
(1856-1940)
Louis Dartige du Fournet est né le 2 mars 1856, au nord-ouest de la France, dans le département de l’Orne en région Normandie. Plus tard, Louis Dartige du Fournet a ajouté à son prénom le nom de famille aristocratique de sa grand-mère paternelle.
Il était d’abord un officier de marine français, puis il a terminé sa carrière avec le grade de vice-amiral. Il est entré en 1872 à l'École navale. Lors de la campagne du Siam en 1872 il était le commandant de la frégate "La Comète". Il a participé activement à la libération du port de Bangkok, en résultat de laquelle la France a reçu la rive gauche du Mékong (le Laos). Louis Dartige du Fournet est devenu ensuite en second du capitaine sur le croiseur-cuirassé "Pothuau", puis il a commandé le croiseur "Surcouf" de l'escadre du Nord.
En 1909, il est nommé contre-amiral. De 1912 à 1913 il a participé à la guerre des Balkans étant à la tête de la flotte française, après quoi il est nommé vice-amiral.Pendant la Première Guerre mondiale, il est nommé vice-amiral de l'escadre française de l'Orient qui a fait appliquer le blocus des côtes turques en Syrie en août 1915.
Il est démis de ses fonctions par le ministre de la Marine, Lucien Lacaze, suite à l'embuscade à Athènes en décembre 1916, ainsi terminant son service militaire. Il a cherché à réintégrer l'armée de terre à la fin de la Première Guerre mondiale.
N’ayant pas d'héritier et étant rejeté, il a épousé une veuve avec qui il a vécu dans la région sud-est de la France, dans une modeste maison à Saint-Chamassy, non loin du village. Il est mort le 16 février 1940 et il est enterré au village Saint-Chamassy.
Au cours de sa vie, Dartige du Fournet a publié plusieurs mémoires dont l'un intitulé "Les souvenirs de guerre d’un amiral" (Paris, 1920) est le plus précieux pour nous.
Dans ce livre, il a consacré un chapitre à la défense héroïque du Mont Moïse. Il y a présenté les détails du sauvetage et du déplacement des 4080 Arméniens à Port-Saïd.
Fragments des souvenirs de Louis Dartige du Fournet: " Dans les premiers jours de septembre, le croiseur " Guichen ", commandé par le capitaine de Frégate Brisson, longeait la côte au nord d’Antioche, quand il aperçoit des signaux à terre. Une embarcation est envoyée à la plage et elle apprend que les Arméniens, fixés là dans les hautes terres du Mont Moïse (Djebel Moussa) sont menacés d’être massacrés par les turcs. Averti le 6 septembre par T. S. F., je rallie aussitôt avec la " Jeanne d’Arc ". Pierre (Pedros) Dimlakian, l’un des chefs arméniens, vient à bord en demandant que les non combattants (les vieux, les femmes, les enfants) soient évacués… je reconnais bientôt qu’il faut évacuer ces malheureux. Le temps presse et, quoi qu’ils en disent eux-mêmes, il faut les évacuer tous… J'ai télégraphié au ministère de la Marine pour le mettre au courant... "Tous les bâtiments disponibles y ont été envoyés et le 13 (septembre), les arméniens sont embarqués. L’opération s’est effectuée sans incident sinon sans difficultés… Il y avait là de pauvres bébés enveloppés dans des serviettes- éponges, qu’on se passait de main en main à travers le ressac, petits Moïses, vraiment sauvés des eaux, et qui ne sauront jamais que par ouï-dire à quels dangers ils ont échappé ".
La Une du livre de Dartige du Fournet intitulé "Les souvenirs de guerre d’un amiral (1914-1916)" (Paris, 1920)
Au printemps 1915 les Arméniens de la Suedia apprennent la nouvelle de la déportation des Arméniens des provinces voisines. Le 29 Juillet, lors de la réunion des représentants de six villages (Kebusiyeh, Vakif, Kheder Bek, Yoghunoluk, Haji Habibli et Bitias) situés dans le district de Musa dagh (mont de Moïse, situé dans le district d’Antioch, une ancienne province d'Alep, près du bourg Suedia), décident de ne pas obéir à l'ordre d'expulsion et d'organiser l'auto-défense sur le Mont Moïse. Le 30 juillet, les Arméniens ont reçu l’ordre d’évacuer leurs foyers. Certains des Arméniens, obéissant aux ordres des Turcs, sont expédiés, les autres, environ cinq mille personnes, principalement des femmes et des enfants, dans l'espoir de salut, sont montés sur le Musa dagh, et se sont préparés à se défendre.
Il a été créé un corps militaire spécial à la tête de Yésaï Yaboughian. Il n’y avait que 600 combattants avec un nombre limité d'armes et d'alimentation. Dans les différentes parties de la montagne on a bâti des fortifications militaires de défense par la stricte discipline militaire.
A partir du 7 août, les Arméniens ont résisté excellemment aux attaques des Turcs, mais la situation des Arméniens de Musa dagh devenait de plus en plus difficile. L'alimentation et les munitions de guerres s'épuisaient.
Dans l'espoir d’avoir une aide des équipages des navires de guerre alliés, les dirigeants de l'auto-défense ont érigé deux drapeaux fabriqués de draps. Sur l’un des drapeaux il a été bordé la croix rouge et sur l'autre, une inscription anglaise " Chrétiens en péril: au secours ! ". Ils faisaient des feux autour des drapeaux, pour attirer l’attention des navires.
Les Arméniens de Musa dagh avec le drapeau de salut, 1915
Le 5 septembre, le croiseur français "Guichen" apparaît sur la mer, qui expédie un canot sur le rivage pour préciser la situation. Pierre Dimlakian, l’un des dirigeants d’auto-défense de Musa dagh s’approchant du navire de guerre, est en mesure d'expliquer la situation actuelle l'équipage et de persuader que le navire de guerre bombait les positions des Turcs pour les paniquer. En apprenant la situation des Arméniens, le commandement de la Marine s’est éloigné par la promesse de fournir de l'aide.
Le croiseur français Guichen, carte postale
Pierre Dimlakian sur le croiseur Guichen, septembre 1915
On a rapporté tout cela à l'amiral du Fournet. Ce dernier, ayant conscient de la gravité de la situation, a envoyé immédiatement un télégramme en France, en présentant la situation. Cependant, étant au courant de la longue bureaucratie française, il a décidé sur place d'envoyer tous les croiseurs ayant à sa disposition pour déplacer toutes les personnes sur le Mont Moïse. En même temps il s’est adressé au Chypre par la question d’abriter les Arméniens de Musa dagh, mais il a reçu une réponse négative. Ensuite, il s’est adressé aux officiers français et britanniques de l’Egypte en les persuadant de préparer des camps à Port-Saïd pour les 4080 Arméniens de Musa dagh.
Le 10 septembre, le 41ème jour de la résistance, deux navires de guerre français s'aperçoivent sur la mer et commencent à bombarder les positions turques. Ensuite, Dartige du Fournet ordonne par ses initiatives privées de déplacer la population par les navires au Port-Saïd de l'Egypte. On évacue tout d'abord les femmes, les enfants et les personnes âgées, puis les forces d'armée. Du 13 au 15 septembre, 4.000 personnes sont transportées par le navire de guerre français "Jeanne d'Arc" et d'autres navires de guerre au Port-Saïd (en Egypte), où sont bâtis les camps des Arméniens de Musa dagh. Les enfants nés à ces jours difficiles obtiennent des noms, symbolisant la liberté, le salut. Même certains enfants se sont appelés Guichen, à l'honneur du navire de guerre français "Guichen".
Les Arméniens de Musa dagh au moment d’embarquement sur le navire français, septembre 1915
Les réfugiés arméniens de Musa dagh sur le navire français, septembre 1915
Le navire français Jeanne d’Arc, carte postale
Les réfugiés arméniens de Musa dagh dans les camps de Port-Saïd
Seulement après trois mois, la réponse est arrivée par télégramme, où il était écrit en français : " Où se trouve mont Moïse ? ". Ainsi, si Dartige du Fournet ne suivait pas à la voix de sa conscience et ne se dirigeait pas par les lois militaires en prenant le risque de ternir sa carrière militaire, aucun Arménien de Musa dagh n’aurait survécu.
Préparé par Seda Parsamyan
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